Comment acheter un aéronef.
par Ciel Québécois
La plupart des pilotes rêveront un jour ou l’autre d’acquérir un aéronef. Photo: Source Internet
Que ce soit pour faire son cours de pilotage, pour les loisirs, ou pour les déplacements d’affaires, toutes les raisons sont bonnes pour avoir le goût d’être propriétaire d’un aéronef. La plupart des mordus d’aviation rêveront un jour ou l’autre d’acquérir un aéronef pour être libres comme l’air et pouvoir assouvir pleinement leur passion.
À la simple évocation d’un tel projet, il est par contre légitime de se poser quelques questions :
-Est-ce un projet accessible à toutes les bourses?
-Quel type d’avion me conviendrait davantage?
-Comment faire pour ne pas acheter un citron? Achat en copropriété ou en solo?
-Comment faire pour transférer à son nom l’immatriculation, les titres de propriété d’un aéronef?
Autant de questions que de pièges potentiels pour un acheteur néophyte, vous en conviendrez…
Une question de compromis.
Tout d’abord, pour avoir participé à plusieurs transactions d’achat-vente, je peux vous dire que lorsque l’on veut s’acheter un avion, ce n’est pas juste un aéronef que l’on magasine, mais bien UN COMPROMIS avec deux ailes!!! Je m’explique :
Malheureusement, il n’existe pas encore d’avion (à ma connaissance du moins) qui pourrait à la fois me permette d’avoir une aile laminaire me pouvant aller vite, qui serait capable d’atterrir à basse vitesse sur des pistes courtes ou molles, en gravier ou en gazon, qui serait idéal pour la famille (spacieux et logeable), capable de m’amener rapidement au lac « Ferme ta Gueule » pour taquiner le gros poisson, tout en étant très facile à piloter, mais aussi pouvant me permettre aisément de pratiquer la voltige aérienne de haut niveau. Pourtant, si je devais remplir un formulaire qui aurait pour titre : « Qu’attendez-vous de l’avion idéal », je serais forcé de répondre « Toutes ces réponses! ». Alors, désoler Messieurs Mesdames, tout comme le Père Noel, l’Homme où la Femme parfaite, l’Avion parfait n’existe pas. Tout au plus y a-t-il de bons et de mauvais « compromis » volant, dépendamment de l’usage que l’on veut en faire et du prix que l’on paye.
De la même manière, clarifions une autre chose : En tant que réel passionné d’aviation, parmi la bonne trentaine de modèles d’avions qu’il m’a été donné de piloter jusqu’à présent (du Cessna 120 jusqu’au Cessna 208 Grand Caravan, de l’ultraléger challenger sur flotteurs amphibies jusqu’au bimoteur rétractable, de l’avion sur roues, sur skis, jusqu’aux flotteurs) TOUS sans exception m’ont déjà procuré un jour ou l’autre, plaisir, satisfaction et bon temps.
Donc, j’en tire comme conclusion qu’en théorie, il n’y ne devrait donc pas y avoir de mauvais avions. Tout au plus peut-être un ou deux désastres de conception, mais que voulez-vous, il faut bien laisser s’échapper un ou deux petits canards noirs de temps en temps. Il n’y a selon moi que des avions mal choisis. La question maintenant reste à savoir quel avion correspondra le mieux avec le genre de vols que nous préconisons, avec la manière dont on veut en tirer du plaisir, avec notre niveau de talent de pilotage et bien malheureusement (car je ne suis pas encore millionnaire) : avec la grosseur du budget qu’on peut y consacrer.
L’aspect financier.
Dans le dossier du mois passé, on vous a parlé en long et en large de l’aspect financier de la chose. Je me limiterai donc à l’essentiel. Que vous achetiez votre avion comptant ou à crédit, l’important c’est de bien le choisir dès le départ, car souvenez-vous d’une chose : C’est en achetant judicieusement votre avion et non pas en le revendant que vous pourrez « faire » (ou sauver) le plus d’argent. Alors : Comment faire?
Acheté tel que vu et essayé!
Dans ce genre de transaction, étant donné l’âge moyen de la flotte québécoise des avions de loisir (entre 1939 et 2009), le type de transaction (la plupart du temps de particulier à particulier), les transactions d’achat-vente d’avion se font pour la plupart « Tel que vu et essayé, sans aucune garantie légale ». Normal!! Qui voudrait donner une garantie sur un avion qui est presque toujours plus vieux que plusieurs d’entre nous! D’où l’importance primordiale de l’inspection pré-achat pour bien cerner l’état de l’appareil.
L’inspection pré-achat.
Une inspection pré-achat est sans l’ombre d’un doute la seule méthode fiable pour établir avec le plus de précision possible la condition physique de l’appareil. Elle rassurera autant le vendeur, l’acheteur (et le conseiller entre les deux le cas échéant) en donnant un portrait contemporain de l’état de l’appareil et en établissement une liste concrète et détaillée des items à corriger pour mettre hypothétiquement l’avion en condition parfaite. Ainsi, l’inspection préachat établira des bases solides de la transaction et deviendra un outil nous permettant, lorsque jumelé avec une étude de marché des comparables, d’évaluer si le prix demandé pour l’appareil est juste ou non.
Une bonne inspection pré-achat devrait selon moi minimalement comporter les points suivants:
• Un examen des documents et livres de bord;
• Un examen des livrets techniques;
• Une vérification d’historique de dommage;
• Une vérification l’accomplissement de toutes les consignes de navigabilité (« AD’s ») affectant l’appareil;
• Un examen physique l’aéronef;
• Une prise de la compression des cylindres du moteur;
• Une validation complète du bon fonctionnement des divers systèmes de l’appareil, effectuée lors d’un point fixe (et/ou un vol d’essai);
Acheter en solo ou en copropriété.
Bien que certain purs et durs vous dirons qu’un avion c’est comme une maîtresse (ou un amant), ça ne se partage pas, tout dépendamment de notre « ouverture d’esprit », de notre tempérament, de nos moyens financiers, de l’intensité de l’usage que l’on prévoit faire de l’appareil, il peut s’avérer une bonne idée de s’embarquer dans l’aventure avec un(e) partenaire. Les principaux avantages de la copropriété sont en fait :
• L’accroissement du pouvoir d’achat et du budget d’opération;
• Le partage du risque en cas de pépin;
• Le support et le partage de la logistique de l’entretien, le déneigement, etc.;
• L’effet d’entraînement et de motivation généré par la synergie du groupe;
• Le partage des expériences (bonnes ou mauvaises).
Ce qu’il faut retenir c’est que la copropriété c’est un peu comme un mariage : il y a des mariages heureux qui durent longtemps et d’autres qui finissent avec une séparation.
L’important avant de s’embarquer c’est de trouver LA bonne personne, qui saura idéalement avoir la même vision, les mêmes capacités financières, que nous. Aussi, comme tout bon « mariage », ça prend des bons papiers, clairs et précis, tout comme le sont le contrat nuptial et le testament dans pour un couple. (Vous trouverez d’ailleurs un exemple de convention de copropriété en pièce jointe. Une autre version en Anglaise existerait également sur le site de la COPA). Toute entente de partenariat devrait minimalement traiter des éléments suivants :
• Les droits et obligations de chacun;
• La définition de ce qui est inclus dans la copropriété (avion, accessoires, etc.);
• La valeur au livre de la copropriété (révisée annuellement);
• La définition et la répartition des coûts fixes;
• La définition des coûts variables;
• Le calendrier d’utilisation (priorité d’usage et non-exclusivité d’usage);
• Les réserves financières (dépréciation ou redevances envers la copropriété) à mettre dans un compte de banque conjoint pour couvrir les coûts variables;
• Conditions à respecter en cas de retraite ou décès d’un des partenaires (conditions de sorties de la copropriété);
Ce faisant, avec un bon contrat et de la rigueur, j’ai personnellement vécu une expérience de copropriété qui a duré trois ans, qui fut des plus satisfaisante, enrichissante et plaisante. Et le plus beau dans l’histoire étant aujourd’hui sortit de cette union, mes anciens partenaires sont encore de bons amis que je continue de côtoyer!!!
En tant que conseiller en aviation, on vient trop souvent me voir pour faire appel à mes services pour établir la valeur marchande d’un appareil, ou aider un « couple de pilotes en instance de divorce » à liquider et/ou revendre leur avion et dans tous les cas, l’autopsie du naufrage de leur copropriété démontre malheureusement la plupart du temps qu’ils ont failli au premier principe élémentaire de la copropriété : l’établissement d’un bon document de départ…