Ma licence de pilote; déductible ou non ?
par Ciel Québécois
Quels sont les critères à respecter pour rendre déductible d’impôts votre cours de pilotage? Photo et texte: Jonathan Beauchesne
Une question qui revient régulièrement dans le monde de l’aviation est de savoir si les frais de formation d’un pilote sont déductibles de son revenu net. Si oui, quels sont les critères à respecter au Canada et au Québec ?
AU FÉDÉRAL
Au niveau fédéral, les frais de formation donnent droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité. Pour ce faire, il faut avoir l’intention d’obtenir une licence de pilote commercial (attention : bien qu’il ne s’agisse que d’une intention, celle-ci ne doit pas s’étirer indéfiniment au risque d’être éventuellement cotisé par les autorités fiscales). Puisqu’il s’agit d’une licence qui vous permette de gagner potentiellement un revenu, les frais de formation qui y sont associés donnent droit à un crédit au même titre, par exemple, que des cours universitaires. Toutefois, tous les frais ne sont pas inclus dans le calcul du crédit. Plus précisément, la position du gouvernement est énoncée dans le bulletin d’interprétation IT-516R2 :
« 29. (…) les frais payés par un élève ou en son nom à une école ou à un club de pilotage aérien reconnu par le ministre du Développement des ressources humaines (…) uniquement si l’élève suit des cours de pilotage aérien en vue de devenir pilote de ligne ou instructeur de vol professionnel. Les frais ne sont admissibles que s’ils peuvent être considérés comme des frais de scolarité. Par conséquent, un élève doit suivre un cours et faire l’objet d’une supervision directe pour demander un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour le coût des heures de vol. Le Ministère accepte qu’un élève suive un cours et soit sous supervision directe lorsqu’il vole en solo. Par conséquent, le coût des heures de vol en solo et en duo, jusqu’au minimum fixé par le ministre des Transports pour obtenir les licences et les qualifications suivantes, est considéré comme faisant partie des frais de scolarité de l’élève:
a) licence de pilote privé — avion;
b) licence de pilote privé — hélicoptère;
c) licence de pilote commercial — avion;
d) licence de pilote commercial — hélicoptère;
e) qualification de vol aux instruments;
f) qualification d’instructeur de vol;
g) qualification de vol de nuit;
h) qualification de pilote d’hydravion.
À l’heure actuelle, l’élève doit avoir effectué au moins 45 heures de vol en solo et en duo pour obtenir une licence de pilote privé et 65 heures supplémentaires pour obtenir une licence de pilote commercial. Les frais de cours donnés à l’école ou à un club de pilotage aérien et les frais de simulateur de vol donnent droit au crédit d’impôt pour frais de scolarité, mais les dépenses engagées par un élève pour piloter son propre avion pendant qu’il suit des cours à une école ou à un club de pilotage ne le sont pas. »
Ces frais ne doivent évidemment pas avoir fait l’objet d’un remboursement par un employeur ou une aide financière gouvernementale. Ainsi, les frais associés à 110 heures de vol sont reconnus dans le cadre des frais de scolarité admissibles. En ce qui concerne les technicalités administratives, voici les étapes à suivre :
1- Le formulaire TL11B doit être rempli par l’école de pilotage afin d’attester vos frais de formation;
2- Inscrire ces frais à l’annexe 11 de votre déclaration de revenus afin de calculer vos frais de scolarité admissibles. Au bas de cette annexe, vous pourrez également calculer le montant qu’il vous est possible de reporter dans le futur ainsi que le montant que vous pouvez transférer (le crédit d’impôt est non remboursable, mais transférable) à votre époux(se), conjoint(e) de fait et/ou aux grands-parents de l’un ou l’autre des conjoints;
3- Finalement, inscrire le montant de frais admissibles à la ligne 323 de l’annexe 1 de votre déclaration de revenus afin de calculer le crédit d’impôt auquel vous avez droit.
AU QUÉBEC
Au Québec, la position gouvernementale est sensiblement la même qu’au fédéral, le Ministre du revenu de la province ayant harmonisé les critères de reconnaissance des frais de formation avec ceux du gouvernement canadien. Plus précisément, les autorités fiscales québécoises stipulent dans le bulletin d’interprétation IMP. 752.0.18.10-3 :
« 1. En vertu de l’article 752.0.18.10 de la Loi, un particulier peut déduire dans le calcul de son impôt à payer pour une année d’imposition donnée, un pourcentage, déterminé annuellement, de ses frais payés à une école ou à un club de pilotage aérien à l’égard de cette année ou d’une année antérieure, si, notamment, les conditions suivantes sont rencontrées :
1° les frais ont été payés à une école ou à un club de pilotage aérien reconnu par le ministre du Revenu;
2° le particulier s’est inscrit comme étudiant à cette école ou à ce club pour lui permettre d’acquérir ou d’améliorer les connaissances nécessaires à une occupation;
3° les frais qui ont été payés se qualifient à titre de frais de scolarité ou de frais d’examen.
2. Afin de pouvoir piloter un aéronef, un particulier doit rencontrer les normes (ci-après les «normes fédérales») appliquées par le ministère fédéral des Transports. En vertu de celles-ci, le particulier doit recevoir une formation particulière, en fonction du type de licence voulue (ex.: licence de pilotage d’avion, licence de pilotage d’hélicoptère, etc.).
3. La formation en vue d’obtenir une licence de pilotage donnée comporte des exercices de vol en double commande et des exercices de vol en solo. Dans les deux cas, les normes fédérales requièrent qu’un nombre minimum d’heures de vol soit effectué.
4. Les frais payés à une école ou à un club de pilotage aérien reconnu par le ministre du Revenu pour effectuer ces exercices de vol constituent des frais de scolarité et peuvent être pris en compte dans le calcul du crédit d’impôt pour frais de scolarité.
5. Au contraire, les frais payés pour des exercices de vols dont la durée excède le minimum requis par les normes fédérales pour l’obtention de la licence donnée ne peuvent être pris en compte dans le calcul du crédit d’impôt pour frais de scolarité.
6. De plus, les normes fédérales requièrent des pilotes que ceux-ci mettent à jour périodiquement leurs connaissances. Cette mise à jour peut prendre différentes formes et des frais peuvent, dans certains cas, être exigés.
7. Les frais payés pour cette mise à jour, le cas échéant, ne peuvent être pris en compte aux fins du crédit d’impôt pour frais de scolarité ou d’examen. En effet, cette mise à jour ne constitue pas un enseignement qui permet au particulier d’acquérir ou d’améliorer les connaissances nécessaires à son occupation. Il s’agit plutôt d’une mesure qui permet à l’étudiant de maintenir son niveau de connaissance de telle sorte qu’il puisse conserver sa licence. »
Les frais admissibles sont donc les mêmes qu’au fédéral. Ce crédit également transférable à un (seul) parent (le père ou la mère de l’étudiant, ou du conjoint de l’étudiant, le grand-père ou la grand-mère de l’étudiant, ou du conjoint de l’étudiant, ou le conjoint de l’une de ces personnes). Cependant, suite à l’obtention de votre licence de pilote commercial, les montants défrayés afin de maintenir vos connaissances à jour et, par conséquent, votre licence valide, ne sont pas admissibles au crédit d’impôt pour frais de scolarité.
Voici les étapes à suivre en ce qui concerne les formulaires fiscaux du Québec :
1- Le formulaire que votre école doit remplir afin que vos frais de formation soient reconnus est le TP-752.0.18.10 ;
2- Remplir la section A de l’annexe T de votre déclaration de revenus. Vous y calculerez vos frais de scolarité admissibles ainsi que le montant que vous désirez reporter dans le futur. Le montant utilisé cette année doit être inscrit à la ligne 384 de votre déclaration de revenus afin de déterminer le crédit d’impôt auquel vous avez droit;
3- Si vous désirez transférer une partie de vos frais de formation admissibles, remplir la section B et de l’annexe T.
CONCLUSION:
Comme vous pouvez le constater, une planification fiscale rigoureuse et un suivi des dépenses de formation permettront à tout pilote commercial d’optimiser son remboursement d’impôt. Un dernier point important : conservez toutes vos factures!. Une vérification pourrait être effectuée par les autorités fiscales à tout moment. Sans preuve, vous pourriez devoir payer des impôts, des pénalités, ainsi que des intérêts sur les montants admissibles que vous n’arrivez pas à justifier. Il est de votre ressort de prouver que vous avez déboursé ces frais.
En espérant que ces renseignements vous seront utiles lors de vos déclarations d’impôts.
Notez bien
Nous vous recommandons de valider avec un spécialiste de l’impôt puisque votre situation personnelle pourrait différer des exemples ci-haut.
À propos de l’auteur:
Trésorier de l’APBQ et directeur de l’APPAM, Jonathan Beauchesne travaille en tant que comptable-fiscaliste pour une grande entreprise de Montréal. Diplômé de l’UQÀM en finance et de HEC Montréal en comptabilité, il termine présentement sa maîtrise en fiscalité à l’Université de Sherbrooke en plus d’être candidat à l’obtention du titre comptable CMA. Il a contribué à la rédaction de nombreux articles financiers publiés principalement en Europe.